Vous est-il déjà arrivé de planifier quelque chose et de vous rendre compte après coup que vous étiez complètement à côté de la plaque ?
Vous aviez défini un planning et rien ne s’est passé comme prévu. Votre projet vous a pris plus de temps que vous le pensiez. Vous avez fait face à des problèmes que vous n’aviez pas anticipés. D’autres tâches, réunions et rendez-vous se sont ajoutés à votre planning et vous ont fait prendre du retard. Résultat, vous n’avez pas pu accomplir ce que vous aviez prévu.
Ce problème commun s’explique par ce que l’on appelle l’erreur de planification, ou planning fallacy en anglais. Ce biais cognitif a été mis en évidence par Daniel Kahneman et Amos Tversky en 1979 et se définit par :
la tendance à sous-estimer le temps nécessaire pour achever une tâche future, en partie en raison de la dépendance à l’égard de trop scénarios de performances optimistes.
Cette mauvaise estimation rend la planification et la gestion du temps difficile. Elle vous empêche aussi de gérer vos projets efficacement.
Alors, comment surmonter l’erreur de planification ?
C’est ce que l’on va voir ensemble dans cet article.
Les 5 grandes causes de l’erreur de planification
Si vous avez tendance à sous-estimer le temps que prendront vos tâches et vos projets, c’est pour une ou plusieurs des raisons suivantes.
Le biais d’optimisme
Le biais d’optimisme est une des causes les plus courantes de l’erreur de planification. Quand vous êtes sous l’influence de ce biais, vous faites des estimations trop optimistes et vous surestimez vos capacités. Vous considérez les informations négatives, mais vous leur donnez moins de poids en comparaison de celles qui sont positives ce qui vous conduit à faire des projections irréalistes.
Le biais d’ancrage
Quand vous accordez trop d’importance aux informations antérieures pour prendre des décisions et que celles-ci sont mauvaises, vous êtes plus susceptible de faire des erreurs de planification parce que vous « ancrez » votre raisonnement. Prenons un exemple pour voir à quoi cela ressemble.
Admettons que vous planifiez un gros projet et que vous vous fixiez une deadline irréaliste à 1 mois. Vous commencez à travailler sur ce projet et après quelques jours, vous réalisez que vous ne pourrez jamais accomplir votre projet à temps. Vous décidez donc de changer votre deadline et vous vous laissez 3 jours en plus pour l’accomplir. Seulement même avec ces quelques jours en plus, votre deadline reste toujours irréaliste.
C’est un cas typique de biais d’ancrage. Ici votre deadline initiale d’1 mois joue le rôle d’ancre et toute votre réflexion tourne autour de celle-ci. Vous vous sentez contraint de raisonner à partir de celle-ci, même si elle est irréaliste. Et c’est ce qui explique que vous faites des erreurs de planification.
La pensée illusoire
La pensée illusoire (ou wishful Thinking en anglais) fait référence à la formation d’opinons, de décisions et de stratégies sur la base de la motivation et des désirs plutôt que sur ce qui est réaliste et rationnel.
Pour vous donner un exemple concret, il y a quelques années j’ai créé un blog et mon objectif était de générer 10 000€/mois en 3 mois. Ma seule “stratégie” pour y parvenir était de créer un produit et de le vendre 200€. À l’époque, je n’avais aucun prospect et aucune connaissance en marketing. J’espérais seulement qu’après avoir créé mon produit, les gens le découvrent miraculeusement et l’achètent. Comment ? Je n’en avais aucune idée. J’étais incapable d’expliquer comment ce serait possible. Mais c’est ce que je désirais.
Ici j’étais pleinement sous l’influence de la pensée illusoire. Mon plan n’était pas du tout réaliste et ma réflexion était seulement guidée par mon désir d’atteindre mon objectif.
La pression sociale
La pression sociale peut aussi vous pousser à mal planifier. Quand votre supérieur hiérarchique, vos clients ou vos actionnaires vous mettent la pression pour accomplir un projet rapidement, vous vous sentez obligé de fixer des deadlines irréalistes pour satisfaire leurs attentes, ce qui conduit là encore à des erreurs de planification.
L’ego
Enfin la dernière raison pour laquelle vous pouvez être amené à faire des erreurs de planification est à cause de votre ego. Dans ce cas de figure, vous définissez des deadlines impossibles à atteindre dans le but d’impressionner les autres. Cette cause est moins fréquente, mais bien réelle pour certaines personnes.
Maintenant que vous connaissez les 5 grandes causes de l’erreur de planification, comment la surmonter ?
Comment surmonter l’erreur de planification ?
L’implémentation d’intention
L’implémentation d’intention est une excellente façon de rester réaliste au moment de planifier comme le prouve une étude réalisée en Grande-Bretagne.
En 2001 des chercheurs anglais ont mené une expérience pendant 2 semaines auprès de 248 personnes. Le but était d’aider ces dernières à développer l’habitude de faire de l’exercice régulièrement. Les participants furent divisés en 3 groupes.
Le premier groupe (le groupe de contrôle) devait noter quand il avait fait une activité physique.
Le second groupe (le groupe de motivation) devait faire la même chose que le premier et lire en plus des informations sur les bénéfices du sport.
Enfin le 3ème et dernier groupe avait les mêmes consignes que le second groupe et devait en plus formuler un plan en précisant où et quand il ferait du sport en complétant la phrase suivante : “La semaine prochaine, je ferai au moins 20 minutes d’exercices intenses le [JOUR] à [HEURE] au [ENDROIT].”
Voici les résultats de l’étude : 35 et 38% des membres du premier et second groupe se sont exercés la semaine suivante et 91% des membres du 3ème groupe ont fait du sport au moins une fois. C’est 2 fois plus que les 2 autres groupes !
Ces résultats démontrent toute la puissance de l’implémentation d’intentions. Quand vous définissez précisément quand vous accomplirez vos tâches, non seulement vous procrastinez moins, mais vous planifiez aussi mieux parce que vous êtes forcé de réfléchir au temps que prendront vos tâches et à leur faisabilité.
Pour éviter les erreurs de planification, définissez donc des créneaux spécifiques dans votre calendrier pendant lesquels vous accomplirez vos tâches.
Lire aussi : Mieux gérer son temps avec le time blocking
Chronométrez votre temps
Ce qui ne se mesure pas ne s’améliore pas.
William Edwards Deming
Pour éviter les erreurs de planification, vous devez apprendre à mieux estimer le temps que vos tâches vous prendront. Et pour cela quoi de mieux que de les chronométrer ?
En chronométrant vos tâches, vous aurez une idée précise du temps qu’elles vous prennent. Vous saurez par exemple qu’en moyenne vous mettez 1 heure à traiter vos emails, qu’écrire un article vous prend 2 heures et que préparer vos réunions vous prend 30 minutes. Avec ces données en tête, vous pourrez alors mieux planifier votre travail et limiter les erreurs de planification.
Pour chronométrer vos tâches, je vous recommande d’utiliser l’application Toggl ou Timing. Toggl est un outil de time-tracking actif dans le sens où c’est vous qui cliquez sur un bouton pour lancer et arrêter le chronomètre. L’application vous donne aussi un compte-rendu précis du temps que vos tâches et vos projets vous ont pris.
Timing vous donne les mêmes informations, mais fonctionne différemment puisque c’est un outil passif. Il tourne en tâche de fond et mesure toutes vos activités sans que vous n’ayez rien à faire.
Quel que soit l’outil que vous utilisez, le plus important est de prendre l’habitude de mesurer ce que vous faites pour mieux planifier ensuite.
Divisez vos grands projets en plusieurs étapes
Quand vous démarrez un nouveau projet, vous pouvez être tenté de précipiter les choses et définir tout de suite une deadline approximative sur la seule base de votre intuition. Par exemple vous vous direz : “D’ici 2 semaines je créerai mon site internet” Seulement en définissant une date butoir au doigt mouillé, vous vous tromperez presque à tous les coups parce que vous ne vous baserez sur rien de concret.
Plutôt que de foncer tête baissée et définir tout de suite une deadline, commencez plutôt par identifier les différentes étapes intermédiaires de votre projet, puis déterminez leur deadline respective. Vous pourriez dire par exemple :
- Trouver un nom pour mon site – 10 janvier
- Déposer mon nom de domaine et choisir un hébergeur – 10 janvier
- Créer mon site sur WordPress – 14 janvier
- Définir et créer les pages principales – 21 janvier
- Publier 5 articles – 4 février
En définissant ces différentes étapes, vous saurez que la date butoir finale pour la réalisation de votre site sera le 4 février. Cette date se basera sur les étapes concrètes que vous aurez identifiées.
Prévoyez toujours un “buffer”
En productivité la loi de Hofstadter dit ceci :
Il faut toujours plus de temps que prévu, même en tenant compte de la Loi de Hofstadter.
Cette loi nous rappelle de toujours prévoir large quand on planifie. Si vous estimez qu’une tâche vous prendra 1h, bloquez plutôt 1h30 dans votre agenda. En ajoutant ces 30 minutes de buffer, vous pourrez mieux anticiper les potentiels imprévus et garder les choses sous contrôle.
Personnellement quand je planifie ma semaine, je prévois toujours plus de temps pour accomplir mon travail et je me laisse aussi 2 heures de libre en fin de journée. Si les choses ne se passent pas comme prévu, j’utilise les 2 heures pour résoudre les problèmes et encaisser les retards. Et si tout se déroule sans accroc, j’en profite pour prendre de l’avance sur la journée suivante.
En évitant de surbooker vos journées et en prévoyant ces buffers, vous limiterez les erreurs de planification.
Conclusion
L’erreur de planification est un problème commun qui s’explique par 5 grandes causes : le biais d’optimisme, le biais d’ancrage, la pensée illusoire, la pression sociale et l’ego.
Pour surmonter ce problème, vous pouvez vous y prendre de plusieurs façons :
- Implémentez vos intentions en définissant précisément où et quand vous accomplirez vos tâches pour rester réaliste
- Chronométrez votre temps avec Toggl/Timing pour avoir une meilleure estimation du temps que vos tâches et vos projets vous prendront
- Divisez vos grands projets en plusieurs étapes qui ont chacune leur date butoir respective
- Prévoyez toujours plus de temps pour anticiper les potentiels imprévus