Le perfectionnisme est une qualité et un handicap à la fois. Quand vous êtes perfectionniste, vous êtes capable de réaliser des choses extraordinaires, mais souvent au prix de votre santé mentale et physique.
L’exemple le plus dramatique de perfectionnisme est sans doute celui de Bernard Loiseau, le chef cuisinier et restaurateur français.
M. Loiseau était un bourreau de travail. Il était extrêmement exigent et pointilleux. C’est d’ailleurs ce qui lui a permis d’obtenir les prestigieuses 3 étoiles au Guide Michelin et de se propulser à la une du New York Time dans les années 90.
Mais ce que l’on sait moins sur ce grand chef étoilé, c’est qu’il se mettait une pression inhumaine sur les épaules. Un de ses amis a un jour confié qu’il était sujet à de graves crises d’angoisse et qu’il se soignait au Prozac. Sa femme a également dit de son mari qu’il était bipolaire et maniaco-dépressif.
Alors quand en 2003, il a fait l’objet d’une rétrogradation de 19/20 à 17/20 du guide Gault et Millau et qu’il a essuyé les vives critiques du Figaro, il ne l’a pas supporté et a mis fin à ses jours.
Beaucoup de personnes se seraient contentées d’un 17/20 qui est déjà une excellente note en soi, mais pas un perfectionniste. Un perfectionniste n’est jamais satisfait. Pour lui, le travail n’est jamais fini, on peut toujours faire mieux.
Alors, peut-être que c’est aussi ce que vous pensez. Peut-être que vous n’êtes jamais satisfait de votre travail et que vous avez l’impression de ne jamais en faire assez. Et peut-être que vous êtes perfectionniste.
En tout cas, vous n’allez pas tarder à le savoir. Dans cet article, vous allez voir, qu’est-ce que le perfectionnisme, comment savoir si vous êtes perfectionniste, et comment le surmonter.
Qu’est-ce que le perfectionnisme ?
En psychologie, le perfectionnisme est un trait de personnalité qui pousse les personnes à chercher la perfection alors qu’elle est par définition impossible à atteindre.
Les perfectionnistes sont par nature très durs envers eux-mêmes. Ils sont rarement satisfaits de ce qu’ils accomplissent. Leurs attentes irréalistes, leur besoin d’être irréprochable et leur peur de commettre des erreurs leur causent beaucoup de frustration et de stress.
Selon Don Hamachek, psychologue américain, on trouve principalement 2 types de perfectionnisme 1:
- le perfectionnisme normal : c’est quand une personne a de hauts standards, mais parvient tout de même à trouver satisfaction par un effort soutenu
- le perfectionnisme névrotique : c’est quand une personne ne parvient jamais à trouver satisfaction, peu importe le degré de travail, de sacrifice et d’effort fournis. Elle poursuit ses objectifs plus par peur de l’échec que par désir d’accomplissement.
Alors attention, il ne faut pas confondre être perfectionniste et être consciencieux. Car contrairement aux perfectionnistes, les personnes consciencieuses, elles, se fixent des standards atteignables. Elles savent doser les efforts et acceptent leurs erreurs.
Les perfectionnistes par contre se fixent des objectifs inatteignables. Ils ont beaucoup de mal à accepter les erreurs et investissent parfois des efforts considérables dans des petits détails sans importance au détriment de choses plus prioritaires.
Ce trait de personnalité se développe généralement dans l’enfance. Un enfant qui grandit dans un environnement où ses parents sont rigides, où ils ont de grandes attentes de lui et où il apprend que la seule façon d’être aimé et reconnu est d’accomplir de grandes choses deviendra très souvent perfectionniste.
Les conséquences du perfectionnisme
Le perfectionnisme a de nombreuses conséquences à commencer par le stress et l’anxiété. Quand vous vous fixez des standards impossibles à atteindre et que vous ne vous laissez aucune marge d’erreur, vous vous mettez une énorme pression sur les épaules. Car ce que vous demandez de vous-même est humainement impossible.
Être perfectionniste est aussi très fatigant. Vous dépensez beaucoup d’énergie à vouloir tout contrôler dans les moindres détails et à chercher à ce que tout soit parfait. Et comme vous jugez que vous n’en faites jamais assez, vous ne vous accordez jamais de repos, vous travaillez sans relâche.
Cela vous rend aussi moins productif, car comme on l’a vu un peu plus haut vous vous investissez parfois de façon inconsidérée sur des petits détails sans importance au détriment du reste. Dans certains cas cela vous fait aussi à procrastiner. Vous vous fixez des standards tellement haut que l’idée même de commencer vous décourage. Vous préférez alors remettre au lendemain plutôt que de réaliser quelque chose d’imparfait.
Le perfectionnisme crée aussi un terrain propice à la dépression. Quand vous vivez chaque jour avec le sentiment de ne jamais être assez et de ne jamais pouvoir faire assez bien, vous développez une faible estime de vous et vous avez du mal à trouver foi en l’avenir ce qui peut créer une profonde tristesse.
Le perfectionnisme n’est donc pas à prendre à la légère.
Comment savoir si vous êtes perfectionniste ?
On est tous plus ou moins perfectionnistes. Mais les plus perfectionnistes d’entre nous ont des caractéristiques que les autres n’ont pas. Si vous vous reconnaissez dans les points suivants, c’est sans doute que vous êtes plus perfectionniste que la moyenne.
Vous êtes très critique envers vous-même
Quand vous êtes perfectionniste, vous êtes votre pire critique. Si vous obtenez d’excellents résultats, tout ce que vous voyez ce sont toutes les petites choses que vous auriez pu mieux faire. Toutes ces erreurs et ces imperfections que vous auriez pu éviter. Vous n’êtes jamais à être 100% satisfait de votre travail.
Vous avez des attentes irréalistes
Quand vous accomplissez une tâche ou un projet, vous avez des attentes irréalistes.
Vous commencez l’écriture et vous voulez être aussi bon que Stephen King. Vous apprenez une nouvelle langue et vous aimeriez pouvoir la parler couramment au bout de quelques leçons. Vous débutez la course à pied et vous vous fixez pour objectif de courir 15 km dès la première session. Et quand vous ne réussissez pas, vous vous dévalorisez.
Vous pensez en noir et blanc
Quand vous faites quelque chose, tout doit être parfait. Tout ce qui est moins bien que parfait est considéré comme un échec, même si c’est déjà excellent.
Si vous obtenez un 17/20, vous percevrez cette note comme un échec parce que vous auriez pu obtenir un 20/20. Si 95% des gens se disent satisfaits de votre travail et 5% émettent quelques réservent, vous ne verrez que les critiques. Et si vous accomplissez 9 tâches sur 10 dans votre journée, vous considèrerez que vous n’aurez pas assez travaillez.
Vous ne regardez pas les efforts fournis et les sacrifices que vous faites. Tout ce qui compte, c’est le résultat final. Pour vous, il n’y a pas d’entre 2. C’est soit noir soit blanc.
Vous avez une peur excessive de l’échec
On a tous peur de l’échec, mais les perfectionnistes en ont plus peur que les autres. Quand vous êtes perfectionniste, vous accordez tellement d’importance aux résultats et vous êtes tellement impliqué dans ce que vous faites, que l’idée d’échouer est insupportable.
Pour vous, rater quelque chose, c’est être un raté, un moins que rien. Vous ne voyez pas l’échec comme un apprentissage, mais comme un jugement de votre personne. Vous ne dissociez pas votre travail de qui vous êtes.
Vous vous attardez sur des détails sans importance
Être perfectionniste c’est aussi s’attarder sur des détails sans importance. Vous dépensez une énergie et un temps considérable pour des détails qui ne font aucune différence.
Steve Jobs était un bon exemple de cela. Son attention excessive pour les détails faisait son génie, mais c’en était parfois ridicule. Au moment d’ouvrir un Apple Store par exemple, il aurait débattu pendant 30 min avec ses équipes pour décider de la nuance de gris que le panneau des toilettes devrait avoir 2.
Si vous passez des heures sur des petits détails, c’est un signe que vous êtes perfectionniste.
Vous n’êtes jamais satisfait
Peu importe votre degré de succès, vous en voulez toujours plus. Si vous atteignez X, vous voulez 2 fois X. Et si vous atteignez 2 fois X, vous voulez 5 fois X. Vous n’êtes jamais satisfait de ce que vous avez. Pour vous le travail n’est jamais fini.
Lire aussi : Comment vivre l’instant présent quand on est ambitieux ?
Il existe d’autres traits de caractère des perfectionnistes, mais ceux que nous venons de voir sont les principaux.
Donc en résumé, si vous êtes très critique envers vous-même, si vous avez des attentes irréalistes, si vous pensez en noir et blanc, si vous avez peur excessive de l’échec, si vous vous attardez sur des détails sans importance et si vous n’êtes jamais satisfait de vos résultats, c’est très certainement que vous êtes perfectionniste.
Comment surmonter le perfectionnisme ?
Le perfectionnisme n’est pas une fatalité. Il existe différentes solutions pour le surmonter comme on va le voir dans les points suivants.
Prenez conscience de votre improductivité
Pour surmonter le perfectionnisme, vous devez prendre conscience que cela vous rend improductif.
En cherchant constamment la perfection, vous gaspillez beaucoup de temps et d’énergie à vous attarder sur des détails sans importance au détriment de choses plus prioritaires. Vous fixez la barre tellement haut que vous vous mettez une pression énorme et alimentez vos angoisses. Dans de telles conditions, il est impossible d’être efficace.
Et c’est sans compter la procrastination. Votre recherche de la perfection vous fait remettre les choses au lendemain. Vous préférez ne rien faire aujourd’hui plutôt que de le faire imparfaitement.
Prendre conscience de tout cela est la première étape pour arrêter d’être perfectionniste.
Changez vos standards
Surmonter votre perfectionnisme passe aussi par une redéfinition de vos standards.
Cela ne signifie pas que vous devez être moins ambitieux, mais que vous devez vous fixer des objectifs qui sont humainement atteignables. Parce qu’avoir des standards d’excellence est une bonne chose, avoir des standards irréalistes, en revanche, est improductif.
Donc au moment de commencer une tâche ou un projet, soyez réaliste. Demandez-vous à chaque fois :
Est-ce que c’est vraiment faisable ou est-ce que j’idéalise encore trop les choses ?
Si vous devez donner une présentation dans 3 jours par exemple et que vous êtes déjà débordé de travail, demandez-vous s’il est vraiment faisable de créer 30 slides + une vidéo de présentation. Si ce n’est pas le cas, changez vos standards et concentrez-vous sur l’essentiel.
Créez une checklist
Créer des checklists quand vous êtes perfectionniste peut beaucoup vous aider 3.
Le problème quand vous cherchez la perfection, c’est que vous avez toujours l’impression de ne jamais avoir fini. Si vous écrivez, vous êtes toujours tenté de modifier vos tournures de phrase encore et encore. Si vous faites du montage vidéo, il y a toujours des petits détails que vous voulez modifier au dernier moment. Si vous créez des sites internet, vous ne pouvez pas vous empêcher de changer constamment la mise en page, de décaler des éléments, de changer des images, d’ajouter des effets…
Vous passez des heures entières à perfectionner et à peaufiner.
Le meilleur moyen d’éviter de tomber dans ce piège est de créer des checklists. Voilà comment cela fonctionne :
Avant de commencer une tâche, décomposez-la en microétapes. Par exemple si vous devez écrire un article, créez une microétape recherche, une microétape définition du plan, une micro-étape rédaction de l’introduction, une rédaction de la partie I, II, III, une pour la conclusion et une pour la relecture.
Et à chaque fois que vous complétez une microétape et que vous en êtes à peu près satisfait, cochez-la et interdisez-vous de revenir dessus.
En faisant cela, vous aurez un meilleur sens de quand vos tâches commencent et quand est-ce qu’elles se terminent.
Mettez un minuteur
Dans la même idée, vous pouvez aussi mettre un minuteur. Par exemple, vous vous donnez 1h pour accomplir une tâche et pas une minute de plus.
Et si vous n’avez pas terminé dans le temps imparti et qu’il vous reste encore quelques détails à régler, arrêtez-vous quand même.
Faites comme à l’école pendant un examen. Si vous avez 2h pour écrire votre dissertation et que la sonnerie retentit, vous devez rendre votre copie, que vous ayez fini ou non. Ici c’est le même principe.
En vous imposant un temps limité, cela vous poussera à mieux gérer votre temps.
Cassez le cycle de rumination
Pour surmonter le perfectionnisme, vous devez aussi apprendre à casser votre cycle de rumination.
Si vous êtes perfectionniste et que vous finissez une tâche, une présentation ou un projet… vous aurez généralement tendance à ruminer. Vous repenserez en boucle aux mêmes choses, aux erreurs que vous avez commises, aux critiques qu’on vous a faites, aux choses que vous auriez pu mieux faire…
Toutes ces pensées se répètent encore et encore dans votre tête comme un vieux disque rayé. Pour vivre plus en paix avec vous-même, il faut que vous cassiez ce cycle. Pour cela, voici quelques étapes qui peuvent aider :
- Etape 1 : Prenez conscience que vous ruminez. Observez vos pensées et remarquez que vous êtes en train de ressasser le passé.
- Etape 2 : Ne faites pas confiance à vos premières réactions. Quand vous ruminez, vous avez souvent tendance à imaginer les choses pires qu’elles ne le sont vraiment. Vous donnez une proportion démesurée à vos erreurs et vous sous-estimez votre travail. Plutôt que de vous autocritiquer injustement, essayez de regarder la situation objectivement. Est-ce que vous avez été si mauvais que cela ? Est-ce que c’était vraiment une catastrophe ? En vous posant ces questions, vous pourrez réajuster votre perception des choses.
- Etape 3 : Distrayez-vous. Une fois que vous voyez la situation plus objectivement, cherchez à vous distraire. Lisez un livre, regardez une série, sortez prendre l’air, discutez avec quelqu’un… faites le nécessaire pour ne plus repenser à la situation.
Ces quelques techniques devraient vous aider à surmonter votre perfectionnisme.
Conclusion
Pour conclure, on est tous plus ou moins perfectionnistes et dans la plupart des cas c’est gérable. Le problème, c’est quand vous l’êtes plus que la moyenne. Parce que vous vous sentez plus stressé et anxieux, vous êtes improductif et dans certains cas cela peut même vous conduire à la dépression.
Heureusement, le perfectionnisme n’est pas une fatalité, vous pouvez le surmonter de différentes façons. Déjà en prenant conscience des effets pervers du perfectionnisme, mais aussi en changeant vos standards pour qu’ils soient plus réalistes, en travaillant avec des checklists et un minuteur et en cassant vos cycles de rumination.
Sources :